Sise au 33 rue du Maréchal Lefebvre à Strasbourg, dans la Plaine des Bouchers, l'ancienne usine Junkers est un des rares vestiges français de l'industrie de guerre nazie.

Photo © Vincent Pfrunner / 1D-photo
Initialement occupé par les usines automobiles Mathis depuis 1911, le site industriel a été réquisitionné par la firme Junkers Flugzeug-und-Motorenwerke A.G (important constructeur aéronautique allemand basé à Dessau) dès le début de la Seconde Guerre Mondiale afin d'y construire, roder et réviser des moteurs destinés aux avions de chasse et bombardiers de la Luftwaffe. Le constructeur est notamment célèbre pour avoir été un des premiers à produire des avions entièrement en métal, dont les réalisations les plus connues sont le "Stuka" Ju 87 (bombardier en piquet) et la "Tante Ju", imposant transporteur et bombardier (Ju 52).
En 1941 débute la construction à Strasbourg de deux ensembles de Prüfstand (bancs d'essai) associés à deux tours de refroidissement. Seul le premier bâtiment, le "Werk M" a été achevé et subsiste aujourd'hui.
Chaque bâtiment était constitué de douze bancs d'essais, comportant chacun deux tours rectangulaires ouvertes. Les murs des salles d'essais sont composés de briques creuses disposées en damier afin d'opérer comme pièges à son. Les différentes salles sont arrangées de manière à permettre une circulation efficace entre pièces mais également une extension potentiellement illimitée du bâtiment; cette construction modulaire constitue un bon exemple d'architecture fonctionnelle qui n'est pas sans rappeler les ouvrages du Bauhaus.

Durant son exploitation, l'usine ne construisit principalement que des moteurs pour Ju 88, à la fois bombardier, avion de reconnaissance et chasseur nocturne. Le site employa durant cette période jusqu'à 3.500 personnes (6.500 supplémentaires sur une autre unité de production d'armement à Illkirch-Graffenstaden).
A l'issue de la Seconde Guerre Mondiale, le site fut exploité jusqu'en 1951 par l'Arsenal de l'aéronautique, basé à Châtillon-sous-Bagneux (92), puis laissé à l'abandon. A compter de 1978, les imposants volumes des locaux sont utilisés par une société de location d'engins de chantier.
Après inscription au patrimoine en 1993, le bâtiment inachevé et les tours de refroidissement furent détruits. S'en suivirent différents projets municipaux de transformation du site en espace culturel qui n'aboutirent jamais. En 2001, une entreprise de travaux publics réaménage les locaux et s'y installe.
