La censure
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Madame Anastasie, gravure d'André Gill (1840-1885) |
Surnom donné à la censure des journaux, lié à la représentation graphique d’une vieille femme dotée de grands ciseaux. La figure existait avant la guerre (cf. le Nouveau Larousse illustré, s. d., autour de 1900). Elle avait été créée dans le monde des arts, du théâtre et des lettres. Volontairement dépréciative, cette image renvoie à l’idée d’une mégère furieuse, usant de ses outils pour couper aveuglément le contenu des journaux, sans logique apparente. Née des nombreuses incohérences de traitement constatées par les contemporains dans la presse (un article sur un sujet donné censuré alors que dans un autre journal un autre article sur le même thème « passait » en intégralité ; un article censuré reproduit dans un autre journal un ou deux jours après, cette fois sans censure ; un article anodin censuré pour d’obscures raisons…), « Anastasie » stigmatisait l’arbitraire des décisions prises par les services de censure, dans la bouche ou sous la plume de leurs détracteurs. C’est d’ailleurs cette image d’une censure irrationnelle qui se perpétua après la guerre. Dans les faits, les incohérences initiales furent assez vite remplacées par une application des consignes de plus en plus stricte et rigoureuse.