Le Tilleul de Rougegoutte
Cet arbre situé au pied de la vielle église de Rougegoutte, édifiée sur un promontoire rocheux dominant toute la région, a une origine liée probablement "au Fief de Rougegoutte-Grosmagny". En 1345, Jeanne de Montbéliard, comtesse de Katzenellenbogen, dissocie ces deux villages du domaine rosemontois et les confère à Hennemann et Egloff de Masevaux.
De 1345 à 1791, Rougegoutte est partagé en "deux quartiers" :
- celui de la haute jsutice, à droite de la rivière (la goutte rouge), lequel appartient d'abord aux archiducs d'Autriche possesseurs de notre région jusqu'en 1638 puis au comte de la Suze et enfin à la famille de Mazarin.
- le quartier de la basse justice s'étendant de la rive gauche du torrent jusqu'à Grosmagny.
Depuis le milieu du XVéme siècle, la basse juridiction de Rougegoutte appartient pour moitier aux famille de Chaux et Milandre. Au siècle suivant, l'archiduc d'Autriche confère le fief devenu vacant aux nobles Reinach-Roppe. Les nouveaux seigneurs dont les prérogatives s'étendent alors de plus du fief sur environ 1000 HA de forêts situées à Lepuix-Gy - Malvaux - Giromagny - Vescemont et Riervescemont ont également droit de basse justice sur une vingtaine de sujets résidant au "vieux village" de Giromagny (Place de Gaulle, Quartier du Hautôt) et sur toutes les habitations implantées rive gauche de la Savoureuse à Lepuix-Gy Malvaux.
Au milieu du XVIème siècle, l'exploitation industrielle des mines du Rosemont va troubler la quiétude des nobles de Reinach-Roppe. L'arrivée massive d'une population étrangère d'origine germanique à Giromagny, oblige l'administration autrichienne à mettre en place une justice particulière des mines, laquelle étendra sa compétence sur tout le patrimoine forestier. En 1594, une transaction avec les seigneurs de Rougegoutte, si elle leur reconnaît le droit de propriété sur certaines forêts, les oblige à les laisser charbonner au "quart de leur valeur" pour les fonderies de mines et leur interdit l'implantation de nouvelles métairies dans les zones déboisées. La haute justice du pays, puis celle des mines ont alors chacune un droit de tabellionnage, les détenteurs du fief de Rougegoutte qui ne veulent pas être en reste établissent à leur tour dans ce village un notaire particulier, droit qui leur sera maintes fois contesté. Rougegoutte était donc confirmé comme un siège de la basse justice. Il y fut établi un bailli assisté de neuf juges, d'un tabellion et d'un sergent.
Les Nobles de Rougegoutte ont-ils alors voulu par la plantation d'un arbre (le tilleul), sur une place située au centre géographique de leurs possessions, confirmer leurs droits ancestraux ? C'est à notre avis l'hypothèse la plus vraisemblable. D'ailleurs les archives de la famille Reinach prouvent dès 1665 l'éxistence de ce tilleul, il était déjà adulte à cette date.Mentionné par la suite en 1687 puis en 1715 lors de la démolition de l'ancien choeur de l'église, le "tillot" sous lequel se tiennent les assemblées communales est considéré apprend-on comme un arbre au passé vulnérable.
Plus près de nous, Louis Herbelin dans une description qu'il fit en 1918 s'exprimait ainsi :
"Son tronc énorme présente des particularités remarquables. La pourriture intérieure dont il est atteint, mais qui ne l'empêche pas de se porter encore gallairdement, a eu pour effet de l'ajourer et de le diviser en colonnes..."
D'après la tradition, il aurait été fendu par la foudre au milieu du XIXème siècle. A l'heure actuelle, il a retrouvé une nouvelle jeunesse et étale encore majestueusement son panache. Vers 1910, la Société belfortaine d'émulation le proposa au classement des monuments historiques, mais ce chois ne fut malheureusement pas retenu.
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